Enquêtes sur l'incorporation de Eu3+ et Cm3+ lors de la cristallisation de ZrO2 en solution aqueuse
Rapports scientifiques volume 13, Numéro d'article : 12276 (2023) Citer cet article
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L’énergie nucléaire fournit une source d’énergie à faible teneur en carbone largement utilisée. Après l'exploitation, le combustible nucléaire usé (SNF), contenant un mélange d'éléments radiotoxiques tels que les transuraniens, doit être éliminé en toute sécurité. Le stockage sûr du SNF dans un dépôt géologique en profondeur (DGR) repose sur de multiples barrières de rétention artificielles et naturelles pour prévenir la contamination de l'environnement. Dans ce contexte, la zircone (ZrO2) formée sur le revêtement des tiges de SNF pourrait être utilisée comme barrière technique pour l'immobilisation des radionucléides via une incorporation structurelle. Cette étude étudie l'incorporation de Eu3+ et Cm3+, représentants des transuraniens trivalents, dans la zircone par co-précipitation et cristallisation en solution aqueuse à 80 °C. Une caractérisation structurelle et microstructurale complémentaire a été réalisée par diffraction des rayons X sur poudre (PXRD), analyse d'imagerie spectrale basée sur la spectroscopie de rayons X à dispersion d'énergie en mode microscopie électronique à transmission par balayage (STEM-EDXS) et spectroscopie de luminescence. Les résultats révèlent l'association des dopants avec les particules de zircone et élucident la présence d'espèces distinctes en vrac et superficiellement incorporées. Le vieillissement hydrothermal jusqu'à 460 jours en milieu alcalin indique une grande stabilité de ces espèces incorporées après la cristallisation initiale, sans indication de ségrégation de phases ou de libération d'Eu3+ et de Cm3+ au fil du temps. Ces résultats suggèrent que la zircone constituerait une barrière de rétention technique appropriée pour les actinides trivalents mobilisés dans un DGR.
La plupart des déchets hautement radioactifs produits par la fission de 235UO2 seront à terme stockés dans un dépôt géologique en profondeur (DGR). Les déchets sont principalement constitués de combustible nucléaire usé (SNF), c'est-à-dire UO2, contenant divers produits de fission et transuraniens, tels que Pu, Np, Am et Cm. Plusieurs de ces éléments contribuent à la radiotoxicité à long terme du SNF, qui reviendra finalement au niveau initial du minerai d'uranium naturel après 105 à 106 ans1. Pour l’évaluation de la sûreté du stockage des déchets nucléaires, il est important de comprendre le comportement chimique des éléments transuraniens radiotoxiques à vie longue après une éventuelle intrusion d’eau dans le stockage, ainsi que l’altération ou la corrosion ultérieure des matériaux de barrière et de la matrice SNF elle-même. Ainsi, des réactions immobilisantes, comme l’incorporation de transuraniens dans les phases secondaires, joueront un rôle dans la détermination du devenir de ces radionucléides dans la géosphère2,3. L’un des premiers matériaux avec lesquels les éléments radioactifs de la matrice des déchets peuvent interagir est le Zircaloy, qui est le matériau de gainage des barres de combustible utilisé dans les réacteurs à eau sous pression. Les matériaux à base de zirconium sont prometteurs dans le cadre de la prévention de la contamination radiologique en raison de leur stabilité à long terme ainsi que de leur capacité dopante élevée avant de subir une séparation de phases4,5,6. Déjà pendant le fonctionnement du réacteur, une couche de corrosion passivante en zircone (ZrO2) se forme sur la surface de la gaine7. Au contact de l'eau dans un environnement DGR, une lente dissolution et recristallisation de la couche de ZrO2 peut conduire à l'incorporation de transuraniens potentiellement mobiles issus de la matrice SNF. La zircone possède trois polymorphes naturels. Aux conditions de température et de pression ambiantes, la phase monoclinique (m) est la structure thermodynamiquement la plus stable. Les polymorphes tétragonaux (t) et cubiques (c) peuvent être stabilisés à haute température ou par incorporation de divers aliovalents (par exemple Mg2+, Ca2+, Fe3+, Y3+, La3+, Nb5+)3,8,9,10,11,12,13 ,14 et les cations isovalents (par exemple Ce4+, Ti4+)15,16. L'incorporation de cations subvalents s'accompagne de la formation de lacunes en oxygène dans la structure hôte pour conserver la neutralité de la charge. Ces lacunes réduiront ainsi le nombre de coordination des cations dans la structure, typiquement de l'hôte Zr4+. L'incorporation de dopants subvalents dans le ZrO2 a été étudiée de manière approfondie à l'aide de méthodes de synthèse à haute température (1 000 à 1 500 °C), notamment par co-précipitation ou par voie de réaction à l'état solide, produisant un matériau ZrO2 cristallin et dopé. On en sait beaucoup moins sur le mécanisme d’absorption des cations subvalents, en particulier des actinides, dans la structure cristalline du ZrO2 lors de la cristallisation en solution aqueuse dans le contexte de la gestion des déchets nucléaires.